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HISTOIRE POLITIQUE DU SENEGAL : CHAPITRE I : LE SENEGAL PRECOLONIAL

Réalités socio-éconiques et socio-politiques du Sénégal, visitées par le militant révolutionnaire
anti-impérialiste Alla Kane : formation idéologique et politique des militants

 

INTRODUCTION

 

Dans le cadre d’un programme de formation idéologique de ses adhérents, la direction du parti «Front National de Salut Public/MOM SA REW» ma demandé de préparer pour ses militants un cours portant sur l’histoire politique du Sénégal ; demande à la quelle j’ai répondu favorablement avec le plaisir immense d’avoir, ce faisant, à ouvrir et à conduire un débat sur la politique de notre pays à travers différents âges qui se sont succédés en se nourrissant les uns et les autres jusqu’au paysage politique que nous offre le Sénégal en ce début du XXI siècle.

 

Pour comprendre les tenants et les aboutissants de la politique telle qu’elle se manifeste de nos jours, je propose de remonter le temps le plus lointain possible pour déterrer les racines qui ont poussé à travers des siècles pour donner l’arbre qu’est le Sénégal d’aujourd’hui, dans cette Afrique de l’Ouest évoluant dans un monde devenu un village planétaire.

 

Autrement dit, nous allons essayer de comprendre le présent en interrogeant le passé le plus le plus lointain possible. Comprendre et expliquer la dynamique du processus historique qui a pu engendrer notre Sénégal d’aujourd’hui.

 

Pour ce faire, le cours va s’appuyer et se dérouler sur les trois séquences historiques que sont : la période précoloniale, la période coloniale et celle dite postcoloniale. Ces trois séquences sont intiment liées et participent toutes à tous les résultats enregistrés à travers les siècles qu’elles ont duré jusqu’à l’aube de ce XXI siècle.

 

Il s’y ajoutera, pour compléter le cours, un chapitre spécial consacré à l’Islam.

Le premier chapitre sera consacré à la période précoloniale, le second à la période coloniale, le troisième à celle dite post-coloniale et enfin le quatrième qui traitera spécialement de l’Islam.

 

Quant à l’approche pédagogique, je la voudrais très active; autrement dit, la présentation sera volontairement succincte pour permettre l’ouverture de débats approfondis et enrichissants.

 

Au delà de la formation proprement dite, le but majeur recherché est de fouetter la curiosité intellectuelle de chacun et de tous devant nous pousser à vouloir en savoir et en connaitre davantage pour arriver à faire de notre formation politique notre propre affaire. Pour cela, il n’y a aucun secret. Il faut promouvoir en permanence la recherche et la lecture.

 

Investissez les lieux de mémoire, (les Archives nationales, l’IFAN, la Bibliothèque Universitaire (BU), Internet (Wikipedia) etc.). Constituez votre propre bibliothèque et lisez beaucoup, pour ne pas dire tout le temps. Comme disait l’autre, ayez la passion «des mots et des livres». Les solutions sont dans les livres. Débattez et ne souffrez d’aucun complexe. Vous atteindrez des sommets de la connaissance insoupçonnés.

 

Pourquoi, en cette aube du XXIsiècle, notre pays compte plus de 250 partis politiques, des dizaines d’organisations de la société civile, des dizaines de centrales syndicales, une multitude de coalitions de partis politiques articulés autour d’un homme pour la conquête du pouvoir politique à son unique profit et à celui de sa famille ?

 

L’objet de ce cours est de tenter de répondre à cette question en suivant les méandres tumultueuses de l’histoire de notre pays.

 

A la fin de chaque chapitre, j’introduirai une rubrique intitulée : EXPLOITATION dans l’intention d’ouvrir le débat, de fouetter la curiosité, de pousser à l’approfondissement, de susciter l’esprit critique, d’aiguiser l’appétit de la recherche et de jauger ainsi la compréhension de tous ceux qui se sont intéressés à ce cours sur l’histoire politique du Sénégal.

 

Organisez-vous en groupes de discussion, instaurez le débat, approfondissez les questions soulevées, appliquez les connaissances acquises en procédant à des enquêtes de milieu dans l’espace géographique où vous évoluez pour connaitre davantage et pouvoir le transformer dans le sens voulu.

 

Répertoriez toutes les questions sorties des discussions de groupe qui feront l’objet d’une assemblée générale commune de clôture de dispense du cours.

 

CHAPITRE PREMIER : LE  SENEGAL PRECOLONIAL

 

A cette époque, il serait impropre d’employer le mot SENEGAL qui n’existait pas sous la forme qu’on lui connait aujourd’hui. La configuration du territoire à l’époque précoloniale se présentait sous la forme d’un ensemble d’entités géographiquement délimitées, relativement indépendantes les unes des autres, et  communément appelées : empires ou royaumes.

L’histoire a retenu des noms comme l’Empire du Jolof, les Royaumes du Walo, du Kayor, du Baol, du Fouta Toro, du Sine et du Saloum, etc.

Les premiers royaumes se sont formés au VIIsiècle.

Les plus connus au XIVsiècle étaient l’Empire du Jolof qui regroupait le Kayor, le Baol ; auquel s’ajouteraient les royaumes du Sine et du Saloum, du Walo, et du Fouta Toro ; et au Sud du pays, le Gabou et le Fouladou.

Les rois de ces royaumes portaient un titre particulier comme : Bourba pour le Jolof, Damel pour le Kayor, Brack pour le Walo, Teigne pour le Baol, Bour pour le Sine et le Saloum, et Satigui pour le Fouta Toro.

Le Jolof a connu 30 bourbas, de Alboury Penda Sarr Ndaw à Bouna Alboury Ndiaye.

Le Walo, 52 braks de Ndiadiane Ndiaye (1156/1202) à Ma Mbodj Malik (1840/ 1855).

Le kayor, 32 damels, de Déthié Fou Ndiogou  à Samba Laobé Fall (1883/1886)- 8 damels furent en même temps Teigne.

 

DE QUELQUES ROYAUMES ET LEURS CARACTERISTIQUES

 

LE JOLOF

 

Il  fut  d’abord un empire dont le roi portait le nom de Bourba. Fondé au 14ème siècle, il s’étendait sur le Walo, le Cayor, le Baol, le pays sérère et une partie du Fouta Toro. L’empire éclata au 16ème siècle (1555).

 

Son organisation reposait sur sa division en provinces et villages, sous la direction de chefs nommés par le roi.

 

Avant la scission du 16ème siècle, l’argent et l’or n’ayant cours dans  l’empire, le Jolof prélevait un tribut (galak) en nature de ses différentes provinces.

Ainsi le Cayor donnait du sable fin, le Gandiol du sel, le Walo du poisson, le Sine du  coton et le Saloum du pain de singe.

 

Les cantons traditionnels étaient : Yang Yang, Guebel, Diewol, Tiasdé, Paas-Bakhal, Ndiengol, Latyé et Jolof Penkou.

 

Les principaux dignitaires étaient connus sous les noms de :

  • Lamanes pour les autres provinces de l’Empire avant la scission ;
  • Diambours au nombre de 12, chefs des principaux villages ;
  • Ardos ou Chefs de campements peuls ;
  • kangams au nombre de 6 dont : Toubé ou vice roi ; Boumi ou héritier présomptif ; Beurleup du canton de Paas ; Beurgel de kholkol et Fara du Bakhol.

 

Le Grand Jaraf recevait toutes les plaintes qu’il devait exposer devant le roi.

Un Conseil de 7 membres était requis pour donner son avis sur toutes les questions importantes. Les Kangam étaient réunis en cas de guerre.

Depuis la scission, une vingtaine de Bourbas ont régné sur le seul royaume du Jolof.

 

LE KAYOR

 

Jusqu’au 16ème siècle, le Kayor était une province de l’Empire du Jolof placée sous la responsabilité d’un Lamane. Il s’est érigé en royaume à la suite de la conquête de son indépendance à  la faveur de la scission de l’Empire du Jolof. Son souverain portait le titre de Damel, nom qui a donné le Damelat caractérisant les modalités d’administration du royaume.

 

Le Damelat était un régime politique foncièrement répressif qui incarnait une monarchie de type oligarchique, essentiellement préoccupée par le maintien de l’ordre à l’intérieur, d’une part, et la défense du territoire d’autre part.

 

Le Damel est choisi par une assemblée de grands électeurs représentant les nobles, les hommes libres, les captifs et plus tard les musulmans. Son intronisation se déroulait à Mboul, la capitale.

 

Le Damel ajoutait à son prénom le nom de sa mère et portait le nom d’honneur paternel symbolisant son patrilignage (guenio).

7 familles royales (garmi) ont fourni les dynasties successives de l’histoire du royaume du Kayor : Geedy (11 fois) ; Muyoy (6) ; Dorobé (5) ; Sonio (3) ; Guelwar (2) ; Bey (1) ; Wagadou (1).

 

L’histoire des Damels du Kayor a été celle des luttes entre matrilignages pour s’emparer du pouvoir et le garder.

 

Il y a lieu de rappeler que l’ordre de succession au trône était réglé de la manière suivante :

- les frères du roi lui succédaient par droit d’ainesse.

- la première femme était la reine et portait le titre de Linguère.

 

De la structuration de la société Kayorienne

 

La société Kayorienne reposait sur un clivage se présentant en trois (3) groupes fondamentaux : les Garmi, les Gor et les Diaam.

 

Les Garmi constituaient la haute noblesse dans laquelle étaient choisis les rois sur la base de la filiation maternelle. Cette élection était toujours faite par l’assemblée des grands électeurs comprenant les représentants de toutes les catégories sociales du Kayor. L’occupation principale de ces garmis reposait sur le pillage. Malgré le fait qu’ils étaient minoritaires, ils avaient le monopole du pouvoir parce qu’ils étaient des militaires et des notables. Ainsi avaient-ils le droit de gouverner. Ils avaient sous leur ordre des Dagues et des Sourgas.

 

Les Gor étaient constitués de l’ensemble formé par les nobles garmi et le reste de la masse de la population composée d’hommes libres comme les paysans, les marabouts, etc.

 

Les paysans, autrement appelés Badolo, avaient comme activité principale l’agriculture. Ils étaient les principales victimes du régime. Exposés à la misère, ils étaient les principales cibles des Tiedos qui les pillaient, exploitaient et opprimaient. Ce qui faisait d’eux le grenier de recrutement des groupements religieux dès les 18e et 19e siècles, en qui, ils voyaient un moyen de libération de leurs conditions d’existence des plus désastreuses.

 

Les Diaam constituaient le groupe qui vivait sous un régime d’esclavage en général :

Chez les wolofs, on faisait la distinction entre :

  • Les Diaam Dioudou (captif de case) ;
  • Les Diaamou Bour (esclave du roi) ;
  • Les Diaam Gueño (esclave de père) ;
  • Les Diaam Neg Ndey (esclave de mère).

LE WALO

 

Le Walo avait la caractéristique d’être frontalier de la Mauritanie, du Jolof et du Fouta Toro. Cet état de fait s’accompagnait de luttes frontalières notamment de l’incursion permanente des Maures, ce qui ajoutait aux rivalités internes entrainées par des luttes pour le pouvoir. Comme rappelé plus haut le roi du Walo portait le titre de Brack.

 

En effet, toute l’histoire du Walo a été celle de la lutte pour le pouvoir entre les trois lignages royaux qu’étaient : les Loggar (d’origine maure), les Dioos (d’origine sérère, ou lébou, ou même dénianké) et les Teedieck (d’origine peul ou mandé).

 

Le royaume s’est constitué au 16e siècle, à la suite de sa séparation d’avec le Jolof qui était à l’époque un véritable empire avec à sa tète le Bourba. Le Brack était obligatoirement choisi par voie de filiation utérine, autrement dit, le neveu en ligne maternelle succédait à l’oncle parmi les Loggar, les Dioos ou les Teedieck.

 

En réalité, le Brack n’était pas un monarque absolu. Le pouvoir du Walo s’incarnait dans un Conseil ou Assemblée qui s’appelait SEB ak BAOR, sous la direction de 2 (puis 3) dignitaires sous les noms de :

  • Le premier, DIOGOMAY ou « maître des eaux » qui était chargé de diriger les audiences royales et d’informer le Brack sur la situation du royaume ;
  • Le second, DIOGOOTO ou « maître de la terre » ;
  • Et le troisième, arrivé tardivement, MALO, trésorier du royaume.

 

Le Conseil des SEB ak BAOR détenait le pouvoir de nomination et de destitution du Brack. Il le consultait et le contrôlait aussi. Et comme lui, il avait droit au tiers du butin qui revenait au royaume.  Ainsi, au Walo, fonctionnait bel et bien un régime d’assemblée revêtant la forme d’une monarchie constitutionnelle.

 

LE FOUTA TORO

 En général, on découpe l’histoire du Fouta Toro en cinq phases distinctes:

  1. Celle des Peuls venus de l’Est avec les Diawobés de 934 à 1534 ;
  2. Celle des Saatigui avec Soundiata de 1534 à 1776 ;
  3. La phase des Almamys de 1776 à 1881 ;
  4. Celle du désordre de 1881 à 1891 ;
  5. Enfin la phase de l’implantation de la colonisation française de 1891 à 1960.

 

Pour compléter ces propos tenus sur le Fouta Toro, je vous recommande la contribution du Pr Hamady BOCOUM (chercheur à l’IFAN) publiée sous le titre «Convoquer l’histoire pour fonder l’émergence» à la page 10 du journal Enquête du mercredi 04 Mars 2015. C’est une contribution d’une profondeur historique indéniable et d’une valeur scientifique certaine.

 

Il y retrace de manière claire l’évolution de cette partie du Sénégal. Comme le laissent voir clairement ces quelques extraits que je convoque ici : «L’épopée des Jaa-Ogo est cette aventure qui débute dans la vallée du Sénégal vers le début du premier millénaire avant JC… C’est aussi à cette période que les artisans du fer ont pris l’ascendant sur les autres segments de la société et se sont imposés comme élite politique … Les forgerons ont ainsi dominé, puis gouverné, le Fouta pendant presque un millénaire avec un contrôle absolu sur le fer… A la fin du pouvoir des Jaa-Ogo, ce fut une ère d’ouverture sur la conversion à l’islam de War Jaby sous les Manna. Suivront les Tondjong, les Lam Tagan et Lam Termes avant que les Koliaabé n’instaurent une continuité géographique et politique qui ne sera remise en cause qu’en 1776 pour l’Almamyat… Koli Tenguela et ses alliés Seebe Koliaabé seront les grands unificateurs du Fouta et les figures emblématiques de la première hégémonie peule… Cette dynastie des Deniankoobbé inséparable des Sebbé Koliaabbé, régnera sur le Fouta de 1512 à 1776… La liste dynastique fait état de 28 Satigui dont 5 eurent plusieurs règnes… L’affaiblissement des Deniankoobbé et la montée en puissance d’un islam plus vigoureux viendront à bout du pouvoir des Satigui qui seront vaincus par la révolution Toorodo conduite par Thierno Souleymane BAAL (1776) et qui porta à la tête de l’Almamyat Abdoul Khadir KANE…».

 

Dans le chapitre consacré à l’Islam, on reviendra sur la phase des Almamys de 1776 à 1881 ouverte par la révolution victorieuse de Thierno Souleyman BAAL. De 1526 à 1776, le Fouta Toro a vécu sous le joug d’un royaume dit Dienianko sous la férule d’une monarchie héréditaire qui s’appuyait sur une classe d’administrateurs et de guerriers servant d’auxiliaires du pouvoir en place. En ajoutant à ces développements succincts portant sur les royaumes ci-dessus, ceux du Baol, du Sine, du Saloum, du Boundou, du Niani, du Wouli et plus au Sud, le Ngabou, le Fouladou et la Casamance, on a la configuration exacte de l’espace que nous appelons aujourd’hui Sénégal.

 

La première constatation est l’émiettement dudit espace à l’époque qui en a fait une proie facile face aux forces coloniales françaises qui ont avalé, l’un après l’autre, ces différents royaumes avant d’en faire une seule entité - colonie placée sous son administration directe.

 

La seconde considération est l’absence de relation de quelque nature que ce soit avec l’une quelconque des trois religions monothéistes : le Judaïsme, le Christianisme ou l’Islam.

 

Ces régimes tiédos étaient très éloignés des royaumes de droit divin tels que connus notamment en Europe. Cette caractéristique a échappé à la vigilance des marxistes sénégalais qui ont été fourvoyé par une approche eurocentriste qui a validé le célèbre adage proclamant «la religion opium du peuple».

Dans le chapitre consacré à l’Islam, on essayera de montrer que cet adage ne se vérifie guère dans l’histoire de notre pays.

 

La troisième constatation est l’absence d’écriture, un fait malheureux qui brouille les pistes de l’histoire et rompt les liens de la continuité historique qui permet de mesurer les progrès accomplis et d'apporter, en cas de besoin, les corrections nécessaires. C’est dans ce cadre précis qu’une puissance étrangère est intervenue pour imprimer à cet espace un autre destin qui est celui d’un pays colonisé.

 

Le chapitre qui suit est consacré à cette phase qui est celle de la colonisation dudit espace qui a donné naissance à ce territoire qu’on appelle aujourd’hui SENEGAL.

 

EXPLOITATION

 

  1. Quel est le mode de production à ce stade de l’évolution de cet espace géographique ?
  2. Quelles sont les forces productives ?
  3. Quelles sont les différentes classes de la société ? quelle est la nature de leurs rapports ?
  4. Quelle est la forme de répartition de la production ?
  5. Quelles sont les formes de la structure et de la superstructure de la société ? Autrement dit la base économique et les super-structures idéologiques ?
  6. Quelles sont les différentes contradictions qui traversent le milieu ? quel est le moteur de l’évolution de la société ?
  7. Quelles différences peut-on relever par rapport au même mode de production dans d’autres continents ?
  8. Comment appliquer la dialectique dans l’étude concrète de cette phase de l’évolution du Sénégal précolonial ? quelles sont les différentes étapes de cette phase d’évolution ?
  9. Qu’est ce qui explique la victoire finale de la puissance colonisatrice sur l’ensemble des différentes unités d’organisations sociales trouvées sur place ?

 

Dakar, le 19 Août 2015

 

Alla KANE

 



18/10/2017
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