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HOMMAGE A VALERE SOME REDACTEUR DU DISCOURS D'ORIENTATION POLITIQUE (DOP) DE LA REVOLUTION SANKARISTE AU BURKINA FASO

Valère Somé est décédé le 30 mai 2017. Il fut un des dirigeants de la Fédération des Etudiants d'Afrique Noire en France (FEANF), de l'Union de Lutte Communiste (ULC), du Bureau Politique du Conseil National de la Révolution (CNR) du Burkina Faso, Ministre de l'Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique et rédacteur du Discours d'Orientation Politique (DOP) de la Révolution Sankariste.

 

Dans notre programme de fondation du Rassemblement des Travailleurs Africains-Sénégal (RTA-S) en 1995, lequel a succédé aux journaux ouvriers et populaires Ferñent puis Xal Wi, nous écrivions : "Notre courant politique est né d’une scission du mouvement maoïste initiée par la « Lettre Ouverte » en 1979 et la naissance du groupe « Vive le Marxisme - Léninisme ! » (VML !). Cette période correspond aux débats dans le Mouvement Communiste Internationale sur la théorie maoïste des Trois Mondes, la question des alliances de classe et l’organisation indépendante du prolétariat. Plus tard, des militants du groupe « Pour la Défense du Marxisme - Léninisme » (PDML) qui menaient parallèlement à VML ! la même lutte de démarcation le rejoindront pour former un seul groupe": Ferñent.

 

Cette période de "Naissance et d'enfance de notre courant Marxiste-Léniniste" est aussi celle que nous avons partagée avec Valère Somé et l'Union de Lutte Communiste (ULC) de Haute Volta, devenu avec la Révolution Sankariste le Burkina Faso.

 

L'Union de Lutte Communiste de Haute Volta, Sur la Voie du Bolchevisme du Mali, La Voie Ouvrière de Côte d'Ivoire, Bolchevik League des Etats-Unis, Linea Bolchevique de Porto Rico, L'Union Bolchevique du Canada et Vive le Marxisme-Léninisme du Sénégal vont, entre 1978 et 1980, soutenir les positions du Parti du Travail d'Albanie (PTA) contre le Parti Commniste Chinois (PCC) qui propageait la "théorie des Trois Mondes". Il s'agissait à la fois de lutter sur deux fronts: contre le révisionnisme à la tête du Parti Communiste d'Union Soviétique (PCUS) et contre la théorie révisionniste des "Trois Mondes". Certaines de ces organisations ont aujourd'hui disparu.

 

Mais dès la fin de 1979, nos groupes vont aussi se démarquer du PTA en dénonçant son centrisme conciliateur révélé par nos recherches des racines des révisionnismes de droite et de gauche qui vont dominer le Mouvement Communiste International (MCI) consécutivement à la "destalinisation", l'illusion du "passage pacifique par voie électorale au socialisme", la théorie des deux "superpuissances", du "social-impérialisme soviétique", l'eurocommunisme, etc.

 

Nos groupes vont, ensemble, animer et publier de 1980 à 1983 une revue théorique de débat idéologique et politique ouverte à l'ensemble des groupes communistes anti-révisionnistes et opposés à la "théorie des Trois Mondes". Cette revue intitulée "Correspondance Internationale" reprenait tout simplement le nom du journal de l'International Communiste.

 

Toutes les questions évoquées ci-dessus furent l'objet d'écrits de nos groupes respectifs sur la base du principe "pas de mouvement révolutionnaire sans théorie révolutionnaire" comme l'enseignait fort justement Lénine. Plusieurs de ces sujets avaient été collectivement débattus, ce qui a été un moment d'unité et d'auto-formation mutuelle.

 

Cette période de naissance et d'enfance sera aussi marquée par des erreurs, surtout de gauche, qui feront l'objet de critiques et d'autocritiques dans et entre nos différentes organisations. Ce fut le début d'une période de remise en cause progressive par la critique et l'autocritique des déviations de l'époque de naissance et d'enfance de notre courant Bolchevique.

 

C'est ainsi qu'une étude approfondie du 6éme et du 7éme congrès de l'Internationale Communiste, des documents de 1957, puis de 1960 des conférences de Moscou, de "la lettre en 25 points" du PCC, de la réponse à celle-ci par Souslov du PCUS, de "Réflexion sur la Chine" du PTA, de l'eurocommunisme, du Browderisme étatsunien, de la théorie des Trois Mondes et des expériences Vietnamienne et Cubaine, etc, va permettre de mesurer la profondeur du révisionnisme de droite et de gauche qui minait le Mouvement Communiste International (MCI) après la mort de J.V. Staline. Ce travail commencé ensemble ne sera pas poursuivi ensemble.

 

Pourquoi ? Parce que nos groupes communistes révolutionnaires s'étaient lancés dans le travail de lutte pour la fusion du mouvement ouvrier et du socialisme scientifique dans nos pays respectifs. Ce travail, encore d'actualité, a connu des hauts et des bas, des flux et des reflux surtout avec la défaite de l'URSS et la restauration du capitalisme dans l'ex-camp socialiste.. 

 

Dès lors le travail théorique de chacun de nous sur le terrain national portait principalement sur la nature semi-coloniale ou néo-coloniale des Etats Africains, l'élaboration des éléments programmatiques de la Révolution Nationale Démocratique et Populaire (l'ULC continuait à parler de Révolution Démocratique Populaire en raison de son appproche du passage du colonialisme au néocolonialisme), les classes sociales et la dialectique de leur unité et contradiction dans les semi ou néocolonies, l'étude du panafricanisme colonial, bourgeois néo-colonial, petit bourgeois et prolétarien, la question nationale et son coeur, la question paysanne, notamment la question noire aux Etats-Unis, en Afrique du Sud, l'analyse de l'impérialisme en Afrique et dans nos pays, les plans d'ajustement structurel du FMI et de la Banque Mondiale, les contradictions inter-impérialistes, la contradiction entre les camps impérialiste et socialiste, la problématique de la guerre et de la paix à l'époque de l'impérialisme, la question des dernières colonies (Kanaky, Guadeloupe, Martinique, Guyane, etc) et l'apartheid en Afrique du Sud et le sionisme en Palestine, sans oublier aussi les expériences révolutionnaires africaines: N'Krumah, Cabral, Cheikh Anta Diop, Fanon, Osendé Afana, PAI, l'Union des Populations du Cameroun (UPC), MPLA, FRELIMO, ANC, PCSA, etc .

 

Groupes communistes en construction, la dialectique de l'engagement sur le terrain pour la fusion du mouvement ouvrier et du socialisme scientifique et l'étude de l'évolution et des débats dans le Mouvement Communiste International (MCI) de plus en plus divisé et éclaté ont été gérées dans un isolement relatif par chacun de nous.

 

Cet éloignement objectif a certainement contribué à l'émergence entre nous de différences d'approches, voire de divergences sur les sujets que nous avions, un moment, tenté de cerner ensemble. Mais l'engagement sur nos propres terrains nationaux pour faire émerger un parti d'avant-garde de la classe ouvrière capable de vaincre à la fois le révisionnisme et le néo-colonialisme s'est imposé comme une nécessité incontournable posée par la vie elle-même.

 

Les circonstances particulières de la Révolution Burkinabé du 4 août 1983 ont vu l'ULC et Valère Somé se lancer dans la lutte populaire anti-néocoloniale qu'a été l'expérience révolutionnaire progressiste Sankariste.

 

Valère Somé et l'ULC furent des acteurs importants de la Révolution Démocratique Populaire (RDP, expression de l'ULC) au Burkina Faso.

 

Valère Somé et ses camarades de l'ULC furent persécutés, emprisonnés et torturés par les renégats criminels du "front populaire" de Blaise Compaoré qui ont assassiné Thomas Sankara avec la complicité de l'agent bourgeois de la françafrique Houphouët Boigny de la Côte d'Ivoire et de l'impérialisme Français dirigé par F. Mitterand. Valère a pu s'échapper et s'exiler comme il le raconte dans son dernier ouvrage intitulé "les nuits froides de décembre, l'exil ou la mort, les éditions du millenium, groupe Amos.  

 

Malgré les erreurs dans nos différentes trajectoires, il faut retenir que chacun de nous a néanmoins poursuivi la lutte sous différentes formes évolutives qui montrent que nous sommes restés globalement fidèles au camp des classes ouvrière et populaires. La tragédie de la "chute du mur de Berlin" ne nous a pas fait abandonner le drapeau du Communisme Marxiste-Léniniste.

 

Sur ce sujet nous n'avons pas connaissance des analyses et des positionnements de Valère Somé et de l'ULC sur la défaite temporaire de l'URSS et du camp socialiste ainsi que sur les expériences progressistes de résistances anti-impérialistes à travers le monde, notamment celles en cours en Amérique du Sud et sur les pays rescapés du défunt camp socialiste que sont Cuba, le Vietnam, la Corée du Nord et la Chine dans le contexte du nouveau rapport des forces né de la "remondialisation" impérialiste. Il en est de même de certains de nos autres camarades des groupes communistes, dont certains ont disparu, avec lesquels nous avions animé la revue "Correspondance Internationale". Signalons que Ferñent a synthétisé notre analyse dans la brochure intitulée "LA DEFAITE DU SOCIALISME, LA CRISE DE L'IMPERIALISME ET NOS TÄCHES (Réponse au BP du PIT-Sénégal) '' d'août 1993 et d'autres textes portant sur les expériences Sud-Américaines, etc.

 

Par contre, malgré qu'on ne partage tout son bilan, Valère Somé a laissé à la postérité un ouvrage intitulé "Thomas Sankara, l'espoir assassiné", édition l'harmattan, 1990, dans lequel il expose son analyse de la révolution et de la défaite ainsi que son rôle particulier et celui de son organisation dans l'expérience révolutionnaire et progressiste sankariste. Nous invitons la jeunesse Burkinabé et Africaine à étudier cette contribution importante qui est une illustration défense d'une des expériences révolutionnaires africaines qui a fait dire à un ouvrier les larmes aux yeux que "nous autres Africains sommes vraiment maudits, nous assassinons nos libérateurs et adorons nos oppresseurs".

 

Le 18 novembre 1983, confrontée aux réalités complexes du processus révolutionnaire sankariste, Valère Somé écrivait une lettre à son ami et camarade Thomas Sankara : " J'avais pris ma 'retaite anticipée', mu par un sentiment de découragement. Si aujourd'hui je suis dans la lutte, c'est toi qui m'y as ramené. J'ai accepté de te suivre. Et depuis cette décision prise, je suis prêt à consentir tous les sacrifices indispensables. Ce n'est pas la croyance en un individu qui motive mon engagement. L'expérience accumulée au sein du PAI, de l'OCV, de l'ULC et du mouvement étudiant, m'a convaincu que même parmi les révolutionnaires, ou du moins ceux qui se prennent comme tels, la sincérité, la franchise et le désintéressement sont des qualités rares. Je ne peux affirmer sans le risque de me tromper, que j'ai une connaissance profonde de toi. Cependant, intuitivement, tu m'inspires confiance et je pense reconnaître en toi les valeurs que j'exige d'un véritable camarade. Et c'est là que réside l'explication de mon attachement à ta personne" (cité dans "l'espoir assassiné").  

 

Ce passage donne à postériori un éclairage à la fois sur la relation de Valère à Sankara et sur les luttes de l'époque dans l'entourage même de Thomas Sankara qui ont conduit au coup d'état et à l'assassinat crapuleux de l'espoir Burkinabé qui commençait à illuminer les coeurs et les esprits au Burkina Faso et en Afrique.

 

Valère Somé fait le résumé suivant de la Révolution Burkinabé contre les falsifications du "front populaire" assassin de Blaise Compaoré: "Le peuple Burkinabé calcule lui-même le bilan de cette Révolution, et il aboutit à la conclusion qu'elle fut plus positive que négative, que le bien l'a emporté sur le mal, la lumière sur les ténèbres, la vérité sur le mensonge, le plus-être sur le moins-être. C'est cette constatation qui a fait la renommée internationale de la Révolution Burkinabé et qui a marqué son Président d'une grande auréole illuminant alors tous ses collaborateurs" (idem). Il ajoute ensuite : "Thomas Sankara a professé et laissé entrevoir qu'il ambitionnait d'édifier dans son pays un Etat social démocratique. Au moment où il s'apprêtait à doter son pays d'institutions démocratiques permanentes, à faire acquérir à son peuple, un état d'esprit démocratique, il a été assassiné. On ne devrait jamais perdre de vue dans l'appréciation de son oeuvre, que nulle part l'Etat de droit n'est venu au monde sans un accouchement douloureux, sans un coup de force... (après avoir cité les précurseurs leaders indépendantiste africains, il poursuit) Thomas Sankara a voulu se faire l'héritier de tous ces militants de la dignité et de la liberté de l'homme africain. C'est la raison pour laquelle, il a dans son action, draîné derrière lui la symptathie de la jeunesse africaine. Les masses africaines aspirent à l'affirmation de leur personnalité, longtemps déniée, longtemps bafouée. Elles aspirent à la reconnaissance et la considération mutuelles. Tel était le contenu des paroles du Président Thomas Sankara; telle a été la signification de son entreprise restée inachevée. Des milliers de jeunes en Afrique, sont prêts à la poursuivre, parce qu'il se sont identifiés à lui. C'est cette espérance que l'on a voulu assassiner en assassinant Thomas Sankara" (idem).

 

Valère Somé en conclut contre le journal pro-impérialiste Jeune Afrique : " Nous, nous luttons pour que Thomas Sankara mort ne devienne pas un mythe, une icône inoffensive que l'on laisse aux classes opprimées afin de les endormir. Nous refusons les héros mythiques ou mythifiés. Nous militons pour un Thomas Sankara, héros du peuple, qui a su se distinguer parmi ses compatriotes par ses qualités, sa vertu, son courage, son abnégation dans la lutte pour la liberté, la justice sociale et le progrès. D'autres "Sankara" doivent surgir et surgiront du peuple Burkinabé. C'était bien là le voeu de Thomas Sankara lui-même" (idem).         

 

Thomas Sankara répondait en effet à un journaliste qui lui demandait quelle image il "voulait laisser vu qu'il n'est pas à l'abri d'un assassinat" : "Je souhaite que mon action serve à convaincre les plus incrédules, qu'il y a une force, qu'elle s'appelle le peuple, qu'il faut se battre pour et avec le peuple. Laisser la conviction aussi que, moyennant un certain nombre de précautions et une certaine organisation, nous aurions droit à la victoire, une victoire certaine et durable. Je souhaite que cette conviction gagne tous les autres pour que ce qui semble être aujourd'hui des sacrifices devienne pour eux, demain, des actes normaux et simples. Peut-être, (...) aurons-nous ouvert une voie dans laquelle d'autres, demain, s'engouffreront allègrement ... Et notre consolation sera réelle à mes camarades et à moi-même, si nous avons pu être utiles à quelque chose, si nous avons pu être pionniers" (Interview  tirée du livre de Jean Ziegler "la victoire des vaincus" et cité dans "l'espoir assasiné" de Valère Somé).

 

Valère est parti et nous a quitté après Thomas Sankara, mais la lutte continue pour l'émancipation des peuples d'Afrique. Valère Somé, dans le sillage de Thomas Sankara, a apporté sa pierre à cette expérience révolutionnaire du pays des "hommes intègres".

 

Nous qui avons fait un bout de chemin avec lui dans l'objectif toujours d'actualité que la classe ouvrière Africaine brandisse, en avant-garde, le drapeau de la libération nationale et sociale en tant que seule classe sociale conséquente pour y arriver, nous nous inclinons devant sa mémoire et celle de celui, Thomas Sankara, qui l'a fait re-sortir de sa "retraite anticipée" pour s'engager à "être utile comme pionnier" et "ouvrir une voie dans laquelle d'autres s'engouffreront" pour que l'Afrique et ses peuples se libèrent de l'exploitation et l'oppression impérialiste néo-coloniale.

 

Il aurait certainement beaucoup aimé célébrer les 100 ans de la Révolution d'Octobre 1917.

 

Valère Somé, repose en paix auprès de Thomas Sankara. Vos contributions vont dans le sens de l'histoire, car la victoire appartient en dernière instance toujours au peuple.

Juin 2017

Le Comité Editorial

 



10/08/2017
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