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La « malédiction » de Haïti, c’est l’impérialisme revanchard !  

Les images de désolation et de mort suite au tremblement de terre qui a frappé Haïti font dire et répéter : « quelle malédiction frappe le pays le plus pauvre du monde » ? Dans un extraordinaire élan de compassion et de solidarité, chacun(e) essaye de faire quelque chose et cherche une explication à la dite « malédiction ». Là le parallèle avec l’Afrique, autre lieu de « malédiction » d’où sont originaires les descendants d’esclaves Haïtiens, vient tout de suite comme une « évidence » à l’esprit. En effet, ici réside la force inconsciente de la propagande idéologique impérialiste aujourd’hui, colonialiste hier et esclavagiste avant-hier : « les peuples opprimés sont dominés en raison de la mission civilisatrice des classes dominantes du mode de production capitaliste », ce que le poète président Léopold Sédar SENGHOR avait décliné sous la formule tristement célèbre : « la colonisation est un mal nécessaire ». Et voilà que pour se distinguer M. A. WADE, l’actuel Président du Sénégal dépoussière les reliques Garveyistes du « retour des esclaves noirs affranchis d’Amérique sur la terre africaine de leurs ancêtres » comme « remède à la malédiction de nos frères de race Haïtiens ». A. WADE veut rééditer, sans le savoir peut être, le sionisme noir que l’impérialisme US avait organisé en créant le LIBERIA à la fin du 19éme siècle comme Etat prétendument « indépendant », mais lier à la puissance impérialiste montante étasunienne.      

Ces lectures conscientes ou inconscientes restent marquées par le racisme et l’aliénation qui caractérisent le façonnement des rapports entre dominants et dominés et la division des peuples qui caractérisent l’époque de l’impérialisme, stade suprême du capitalisme.

 

Seconde République d’Amérique et première République noire indépendante    

 

Voilà la grande contribution du peuple Haïtien à l’histoire d’émancipation des peuples avec la naissance du mode de production capitaliste et sa première phase de mondialisation. En effet, c’est en 1793 que fut abolie pour la première fois l’esclavage par les esclaves eux mêmes. Sous la direction de l’esclave Toussaint LOUVERTURE les 400.000 nègres marrons d’Haïti chassèrent les 30.000 esclavagistes, les soldats Espagnols et Anglais qui menaçaient l’île et mirent en échec 50.000 soldats de Napoléon qui tentèrent de rétablir l’esclavage avant que Jean-Jacques DESSALINES, autre esclave, n’inflige une défaite cuisante à la bataille de Vertrières aux armées napoléoniennes et ne proclame en 1804 l’INDEPENDANCE de HAÏTI. Dès lors Haïti devait subir un blocus et un harcèlement provocateur permanent de la part l’impérialisme esclavagiste et colonialiste Français et européen.

En 1825, une nouvelle expédition militaire de 14 navires de guerres envoyé par le roi de France CHARLES X devait imposer au président Jean-Pierre BOYER l’échange de la reconnaissance de l’indépendance formelle du pays contre la dette par laquelle Haïti devait indemniser les esclavagistes Français : « art.2. les habitants actuels de la partie française de Saint Domingue verseront à la caisse fédérale des dépôts et consignations de France, …, d’années en années …, la somme de cent cinquante millions de francs, destinée à dédommager les anciens colons qui réclameront une indemnité … art.3. Nous concédons, à ces conditions, …aux habitants actuels de la partie française de Saint Domingue, l’indépendance pleine et entière de leur gouvernement … (Ordonnance du 17 avril de l’an de grâce 1825) ».

C’est ainsi qu’au 19éme siècle fut inaugurée la mise en place du système néo-colonial fondé sur la dette contre l’indépendance nominale avec le versement par Haïti de 30 millions de francs-or durant cinq ans, somme équivalente au budget de l’état français d’alors et correspondant à une rançon payée par les Haïtiens de 21 milliards de dollars de nos jours.

Pour s’acquitter de cette « dette d’indépendance », Haïti fut contrainte d’emprunter le premier versement de 30 millions de francs-or aux banques françaises qui fixèrent le taux d’intérêt à 6 millions de francs-or. Ce fut le début du système spoliateur d’endettement des ex-colonies qui perdure jusque de nos jours avec les diktats du Fonds Monétaire International (FMI), de la Banque Mondiale et de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) notamment sur les pays d’Afrique. L’économie Haïtienne passa peu à peu de l’agriculture esclavagiste de plantation à l’agriculture d’exportation commerciale pour la maintenir dans la dépendance économique.

 

L’entente et la rivalité entre impérialismes Français et Etasuniens contre le peuple

 

Au 19éme siècle Haïti était déjà un enjeu majeur pour les USA qui avaient obtenu, tout comme Haïti l’indépendance par la lutte armée, mais qui maintenaient le système esclavagiste chez eux jusqu’à la guerre de sécession en 1865. Ainsi JEFFERSON président des USA, parlant de Haïti, a pu déclamer sa haine de « cette peste indépendantiste et anti-esclavagiste de nègres qui ont pris leur indépendance par les armes ». Et en 1914 au moment où tonnaient en Europe les canons de la guerre inter-impérialiste pour se repartager les colonies, l’impérialisme étatsunien débarquait à Haïti pour l’occuper jusqu’en 1934. Haïti devint une néo-colonie du café et du sucre pour les USA.

La résistance farouche incarnée par le martyr Haïtien Charlemagne PERALTE devait obliger les Yankees à se retirer non sans avoir imposer l’abrogation de l’article de la constitution qui interdisait à des étrangers de posséder des entreprises monopolistiques à Haïti. Ententes et Rivalités vont dorénavant rythmer la mainmise des impérialistes Franco-étatsuniens et canadiens sous la dictature fasciste des DUVALIER père et fils et des ‘tontons macoutes’ qui vont faire passer Haïti dans les griffes des recettes néo-libérales des plans d’ajustement structurel du Fond Monétaire International (FMI) et de la Banque Mondiale. La dette Haïtienne équivalait à la somme de 900 millions de dollars, exactement la fortune volée par les tyrans DUVALIER exilés dans des palais dorés en France. La liquidation de la filière nationale de production de riz et de production du porc ‘créole’ mettra fin à l’autosuffisance alimentaire de Haïti. Combinée à la déforestation massive et à l’installation des ‘maquilas’ (entreprises d’assemblage pourvoyeuses d’une main d’œuvre non qualifiée), Haïti fut transformé par l’exode rural massif vers Port au Prince, la capitale, et l’émigration vers les USA, le Canada et la France en « pays le plus pauvre d’Amérique ».

En 1991, le prêtre Jean-Bertrand Aristide, partisan de la théologie de la libération répandue en Amérique du sud, pris le chemin de la résistance, mais il fut renversé neuf mois après son élection par un putsch Franco-étatsunien et canadien. Les USA le ramènent 10 ans après, en 2001, au pouvoir pour duper et calmer le peuple en colère. Et voilà qu’en 2004, à l’occasion du bicentenaire de la révolution anti-coloniale et anti-esclavagiste de la première république noire indépendante, celui que les impérialistes pensaient avoir dompté se met à réclamer à l’état Français le remboursement des 21 milliards de dollars extorqués au 19éme siècle. Pour cet acte courageux Aristide est à nouveau chassé par une expédition militaire de la France, des USA et du Canada. Il est littéralement kidnappé et détenu un moment de Centrafrique, une des 10 bases militaires Françaises en Afrique, avant d’être expulsé en Afrique du Sud jusqu’aujourd’hui. L’expédition militaire putschiste Franco-étatsunienne et canadienne a été ensuite déguisée en présence militaire Onusienne sous le nom de MINUSTAH.              

 

Utiliser le séisme pour l’occupation militaire de Haïti et viser Cuba 

 

L’Argentin Adolfo ESQUIVEL, prix Nobel de la paix, qualifiait fort justement la MINUSTAH élargie à des soldats des pays d’Amérique du Sud « d’intervention sous traitée par les Etats-Unis ». L’armada de plus de 10.000 soldats US qui débarquent en même temps que « l’aide d’urgence humanitaire » suite au tremblement de terre qui a frappé Haïti montre que les impérialistes n’hésitent sur rien du tout pour assouvir leur insatiable soif de domination et d’exploitation. La position stratégique de Haïti dans la mer des Caraïbes face à Cuba est une occasion rêvée pour les USA dans leur projet de contre révolution anti-cubaine.

Il s’agit ici de compléter le dispositif mis en place par la présence renforcée de bases militaires US en Colombie au nombre de sept, au Pérou, au Honduras où le Président légal et légitime a été renversé par un coup d’état, au Panama, etc. Sont visés par cet encerclement militaire qui ne dit pas son nom : Cuba, Venezuela, Bolivie, Equateur, Nicaragua, Salvador, en fait toutes les expériences de gauche progressistes anti-impérialistes et antilibérales et l’ALBA (alternative panaméricaine bolivarienne).

Le prétexte invoqué pour l’envoi de la soldatesque Yankee est « l’insécurité, l’acheminement de l’aide d’urgence », sauf que Haïti a été frappé à plusieurs reprises par des cyclones dévastateurs dans une indifférence quasi totale de la soi-disant « communauté internationale ». Fidel CASTRO parle avant le séisme de « quatre cyclones et tempêtes qui ont causé 900 morts, laissé 800.000 sinistrés et détruit la maigre infrastructure civile du pays ».  La prétendue « inexistence de l’Etat » de ce petit pays de 27.750 km2 et une population de 9 millions d’habitants en 2009 de même que la misère sont les conséquences de l’acharnement des impérialistes contre ce peuple héroïque et martyr depuis plus de 200 ans. L’ampleur de la catastrophe actuelle est utilisée par l’impérialisme US pour s’attaquer à la souveraineté nationale chèrement acquise du peuple Haïtien. Ampleur du désastre humain et matériel qui résultent avant tout des politiques de sous développement imposées à Haïti par l’impérialisme.

L’essence politique revancharde du traitement réservé à Haïti par les puissances impérialistes est dénoncée ainsi par l’écrivain Uruguayen Eduardo GALEANO : « L’histoire de l’acharnement contre Haïti, qui de nos jours prend des dimensions tragiques, est aussi l’histoire du racisme dans la civilisation occidentale ».

Voilà pourquoi la solidarité internationaliste que nous devons au peuple héroïque et martyr Haïtien doit exiger : - l’annulation de la soi-disant dette Haïtienne – le remboursement des 21 milliards de dollars payés par Haïti à l’Etat Français pour qu’il reconnaisse son indépendance – la réparation par les USA de son occupation de Haïti durant plus de 20 ans – un procès pour que le fasciste DUVALIER réfugié en France rembourse les 900 millions de dollars de deniers publics détournés – le retour du Président légitime de Haïti, le prêtre JB ARISTIDE – l’arrêt de l’occupation militaire de Haïti par les troupes US – le versement intégral de l’argent de la solidarité internationale.

Fait le 28/01/10

Par Diagne Fodé Roland

 



07/08/2017
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