OUSMANE SONKO, LEADER DU PARTI PASTEF-LES PATRIOTES : «LE PSE EST UNE SUPERCHERIE DU GOUVERNEMENT DE MACKY SALL»
La quarantaine révolue, Ousmane Sonko est un leader politique né. De l’étudiant en droit public à un patron de parti Pastef-Les patriotes en passant par la fonction d’Inspecteur des Impôts et des domaines par le biais de l’ENA, le patriote trouve toujours le moyen de se battre pour son pays par le travail. Son principal combat reste son attache à ses convictions profondes : celles d’un Sénégal dirigé par un homme intègre, un vrai patriote qui fait de la politique sans se compromettre. En outre, il met en avant les valeurs humaines, signes de son intérêt pour le social, la famille, l’amitié, la fraternité, etc. De plus, il affiche son ancrage culturel dans la région de Ziguinchor. Ouvert dans son expression, il reste aussi ferme dans la force de ses idées, voire agressif. Téméraire, il incarne l’opposant pur et authentique du parti au pouvoir et lance un appel au peuple. C’est la raison pour laquelle, il jette toute sa verve sur le régime en place et multiplie les invectives. En un mot, il chante son ambition politique à travers une symphonie douce et alerte à l’écoute des lecteurs. A ces derniers de lire et d’éprouver la mélodie de ce nouvel épisode de Sud Détente où il fait feu de tout bois.
Comment vous définiriez-vous ? Qui est Ousmane Sonko en fait ?
Je crois qu’Ousmane Sonko est désormais assez bien connu des sénégalais. C’est un citoyen sénégalais simple, qui est né au Sénégal, plus précisément dans la région de Thiès. Mais j’ai passé le plus clair de mon temps dans la région de Ziguinchor en Casamance où j’ai grandi et fait mes études. Par la suite, je suis allé à l’Université Gaston Berger de Saint-Louis où j’ai obtenu ma maîtrise. De là, j’ai fait le concours d’entrée à l’Ecole Nationale d’Administration (ENA) pour devenir Inspecteur des Impôts et Domaines. Et j’ai eu une activité syndicale assez riche. D’ailleurs, c’est moi qui ai mis sur pied un syndicat au sein de l’administration des Impôts et Domaines que j’ai dirigé pendant 8 ans. Avant donc, de passer à la politique à partir de Janvier 2014. Avec des amis, nous avons pensé qu’il était temps de s’engager politiquement. C’est un profil ordinaire, tout ce qu’il y a de plus ordinaire au Sénégal.
Thiès ou Ziguinchor. Sonko se réclame d’où ?
(Avec certitude) De Ziguinchor bien sûr ! Certes, je suis né à Thiès, ma mère est de cette ville, de Khombole précisément. Et je suis le fils de parents fonctionnaires. Et par essence, les fonctionnaires ne restent pas toujours sur place en raison des affectations. Du coup, dans mon enfance, j’ai eu à sillonner une bonne partie du Nord du Sénégal. Mon père a servi à Ndioum (département de Podor). Mon père et à mère ont aussi à eux deux servi à Vélingara en passant par le centre. Donc, c’est une enfance où j’ai dû beaucoup voyagé en compagnie de mes parents en suivant le chemin où leur carrière les a menés. Toujours est-il que je me réclame d’un fils de la Casamance tout en assumant toutes mes autres identités car ma grand-mère maternelle est Halpulaar dans un village du Fouta. L’essentiel, c’est que je reste un vrai sénégalais, qui traverse son pays du Nord au Sud mais qui a un ancrage à sa ville, la Casamance. Là, j’y ai grandi et fait mes humanités et je la considère comme la région la plus belle du Sénégal. Une raison de plus alors pour m’y attacher.
Qu’est-ce qui vous a poussé à entrer dans la politique ?
Mais une prise de conscience ! Vous savez, pour moi, il y a plusieurs façons d’entrer en politique : par souci d’opportunisme, par frustration entre autres. C’est malheureusement cela pour l’essentiel de la classe politique, car elle veut en s’y engageant que la politique soit un moyen d’ascension sociale. Ce qui fait que dès fois, vous voyez des gens qui ont échoué dans tous les domaines et qui veulent rattraper cette perte en politique et qui se retrouvent demain comme députés parce qu’ils ont été sur une liste ou nommés à des postes dont ils n’ont pas les compétences. En ce qui nous concerne, ce n’est ni l’une ni l’autre raison parce qu’il y a eu un éveil de conscience. D’ailleurs, j’ai fait partie des sénégalais qui n’aimaient pas du tout la politique et qui n’avaient jamais envisagé en 2014 d’en faire (ni assisté à des réunions, encore moins pris de carte de membre d’un parti politique). Mais je faisais partie de ces jeunes sénégalais, frustrés par ces politiciens, qui étaient tous pareils à mes yeux. A l’âge adulte, je suis devenu haut fonctionnaire, je me limitais à faire mon travail. Mais c’est peut-être au contact de ce travail que j’ai pris connaissance de beaucoup de choses. En réalité, nous avons tous une grande responsabilité car les gens qui doivent faire la politique, qui en ont les compétences et la formation et qui en ont la probité, ont tendance à fuir la politique en disant que c’est trop sale. Mais la nature à horreur du vide ! Il faut bien qu’il y ait des gens pour en faire. Si les gens de qualité ne la font pas, on laisserait le terrain aux gens qui n’ont aucune envergure, ni vertu et qui ne considèrent l’Etat que comme un moyen d’enrichissement personnel. Déjà en tant qu’étudiants, nous étions des révolutionnaires, on crachait sur la politique et nous sommes restés dans cette même perspective en tant que fonctionnaires.
A un moment donné cependant, nous sommes passés à l’âge adulte en termes de conception des choses. Si on est techniquement bien formé, compétent, intègre, nous le devons à notre pays. Nous sommes des produits à 100% de l’école publique, en partant de l’élémentaire à l’université. C’est-à-dire l’impôt des sénégalais. Il faut être reconnaissant envers notre pays. C’est là que l’idée d’entrer en politique à germer. Et des amis de tout côté m’ont fait confiance et c’était réciproque et m’ont parlé de ce projet. Après s’être réunis, on s’est accordé sur le fait de nous y lancer par nos propres moyens pour éviter d’être formatés par les formations politiques classiques au même parti politique. Mais par rapport à la vision de notre projet, nous voulions une virginité politique mais également cette autonomie de pensées et d’actions. Nous ne voulions pas être conditionnés par le même système qu’on a depuis 57 ans maintenant dont l’expérimentation démontre le sens contraire de ce que nous entendons en matière de politique, sa conception qui est celle d’un art noble visant à se mettre au service de son peuple, à la limite un art cultuel.
Que vous a appris la Direction des Impôts et des Domaines ?
Vous savez, quand vous avez la chance d’être à la Direction générale des Impôts et des Domaines, j’ai tendance à dire que c’est le carrefour de la chose publique parce qu’on y gère les impôts, le foncier et le domaine et d’autres. C’est un carrefour dans lequel on y voit tout et tout le monde. Mais surtout parce que toutes les politiques publiques partent et reviennent vers cette dernière. Aujourd’hui, on est en train de faire le marathon budgétaire mais si on n’est pas capables de mobiliser des recettes fiscales, on ne peut pas parler de budget parce qu’il faut bien financer les programmes. Mais 15 années passées dans cette direction, m’ont amené à être au contact près avec la chose publique mais également avec la chose politique.
Vous êtes le leader du parti PASTEF-Les patriotes. D’où vous est venue l’idée de créer ce parti ? Et à partir de quel moment l’avez-vous fait ?
C’est à travers la prise de conscience d’un groupe tel que je l’ai évoqué plus haut. Mais je ne me suis pas désigné le leader de ce parti, c’est ce groupe d’amis, qui a porté leur choix sur ma personne, m’ont fait confiance. C’est en 2013 qu’il s’est constitué. Dès lors, on a rempli toutes les conditions de fond et de forme. C’est à l’issue de ces dernières, qu’on a tenu d’aller à une assemblée générale ? Celle-ci s’est tenue en janvier 2014 à l’UCAD que le parti a été officiellement créé. Mais il n’a reçu son récépissé qu’en 2015. En étant au contact des hommes politiques, de l’Etat, en mesurant le degré de la légèreté avec laquelle le pays est dirigé ; et surtout par le manque de patriotisme des acteurs politiques ; nous avons pris l’option de mettre en place un parti avec toutes les difficultés liées à cet exercice dans un pays réputé avoir pratiquement 300 partis politiques. Aussi est-il qu’il y a quelques dinosaures politiques qui, apparemment tiennent encore la machine. C’est un pari risqué, difficile mais nous y avons cru. Nous avons encore du chemin à faire ; mais nous avons fait quand même une percée qui fait qu’aujourd’hui nous comptons, nous existons en tant qu’acteurs politiques crédibles, et crédibilisés par le peuple.
Quelle est l’idéologie de ce parti et les principes que vous mettez en avant ?
Vous savez le nom du parti résume les valeurs et les principes que nous défendons. D’ailleurs, c’est un mot qui, symboliquement dans notre langue nationale Wolof réveille une signification forte. « Pastef » c’est la détermination, l’abnégation, l’endurance, la patience, l’engagement. Et il renvoie à beaucoup de vertus dans cette langue, comme «Passe-passe» qui signifie quelque chose que l’on noue dans son cœur. Et cela va encore plus loin, si vous analysez les sigles de ce mot, vous comprendrez les valeurs cachées derrière. En effet, le P et le A signifie « Patriote » car nous nous réclamons des patriotes ; d’ailleurs à ce propos la presse nous appelle aujourd’hui « Les patriotes ». Parce que nous considérons que ce qui a le plus manqué dans ce pays au niveau de notre élite politique, c’est cela, en mettant les intérêts nationaux au-dessus de tout autre intérêt personnel. Nous ne sommes pas dans la théorie. Donc, le « S », c’est le Sénégal et le «T» renvoie au «Travail». Là, nous mettons l’accent sur le fait que nous ne travaillons pas suffisamment dans ce pays. Il faut mettre le pays au travail. Si on compare nos rapports avec ceux des autres pays, on se rend compte qu’on ne travaille pas suffisamment en quantité ni suffisamment bien en qualité. Il faut apprendre aux sénégalais à travailler méthodiquement et sérieusement. Mais si on travaille sans intégrité et sans éthique cela ne vaut absolument rien. D’où le «E» qui incarne l’Ethique. Et l’éthique commence par nos gouvernants. Voyez-vous le nombre de scandales qu’il y a dans ce pays là !
Sous le régime de Macky Sall c’est extraordinaire, avec tous ses rapports, d’ailleurs des corps de contrôle sur lesquels il a mis le «coude» et cela l’épingle tout comme son frère, ses collaborateurs les Oumar Anne du COUD, les Siré Dia de La Poste, les membres Diallo de la Direction des Domaines ainsi de suite. Tous ses rapports sont là ! Sans éthique, il n’y a rien. Les gouvernements doivent être les premiers à faire preuve d’éthique. Malheureusement, il n’y a pas d’éthique dans la gouvernance de notre pays. Il n’y a que de la corruption, de la malversation et sans sanctions. Enfin, le «F», c’est pour la Fraternité car nous avons considéré que la chance du Sénégal, s’est bâtie sur un socle de la fraternité, entre les ethnies, entre les religions, une fraternité également basée sur le cousinage à plaisanteries etc. C’est notre matière première la plus sûre. Si nous ne pouvons pas bâtir une paix sociale et sociétale basée sur cette fraternité indépendamment de nos différences ethniques, religieuses et autres, cela ne servirait à rien pour notre pays. Mais surtout la fraternité africaine, car nous nous réclamons également des panafricanistes, c’est une ouverture sur le monde. C’est cette fraternité justement qui complète le patriotisme. D’ailleurs, le patriotisme n’est pas un repli sur soi. Nous sommes dans une ère de mondialisation et c’est pourquoi nous défendons également cette valeur forte en interne d’abord, entre nous sénégalais, ensuite dans notre cercle le plus immédiat la CDEAO, l’Afrique de manière générale. Bref, une fraternité vis-à-vis du monde entier.
Sur cette lettre «T» dans la signification de Pastef pour suggérer le «Travail», ne pensez-vous pas qu’il est rare de nos jours ?
Oui, vous savez en fait, quand on parle de travail, il n’y en a même pas au Sénégal. Il faut parler de sous-emploi. Aujourd’hui, il est établi que 56% des sénégalais sont classés dans le seuil de très pauvre à pauvre. Et que plus de 50% des jeunes sont dans la pauvreté et vivent la réalité du chômage. Il ne peut d’ailleurs y avoir d’emploi puisqu’on a une économie extravertie qui privilégie les intérêts personnels. Et de plus en plus, on ne suffit plus de dire que nous donnons l’autoroute à péage à telle entreprise française ou autre, sans aucun encadrement notamment d’associer les capitaux sénégalais et de faire un transfert de technologies pour que d’ici quelques années nos entrepreneurs puissent prendre le relais, mais on leur accorde également des rémunérations fiscales totales sur ces marchés là avec aucun impôt et taxe. Mais ce n’est pas cela le pire. Le pire, c’est qu’il leur est permis de venir avec leur personnel. Allez voir le nombre de chinois qu’il y a sur l’autoroute vers Touba !
Faites un tour à l’usine des phosphates de Thiès, où il n’y a que des indiens. Ils importent leur chômage maintenant qui se résorbe chez nous. Même les manœuvres sont importés. Et pendant ce temps, notre jeunesse est là, qui n’a pas d’emploi. C’est la responsabilité de l’Etat. Après vient la responsabilité individuelle de chacun d’entre nous, comme quand je disais qu’on ne travaille pas suffisamment bien. Cela nous interpelle tous autant, c’est-à-dire vous en tant que journalistes, est-ce que vous respectez les horaires de travail, le cahier de charges ou le manuel de procédure, la déontologie, est-ce que vous faites de la qualité etc. Parce que le menuisier ou le tailleur qui est là, ne travaille pas pour l’Etat et n’attend pas celui-ci, peut-être il pourrait attendre une commande publique de l’Etat au lieu de le faire avec les étrangers. D’ailleurs, j’ai dit l’autre jour à l’Assemblée que je ne prends pas les cartes «Total» ou «Shell», je veux qu’on me sert du carburant d’opérateurs nationaux parce que je préfère enrichir un national que plutôt des étrangers. Mais indépendamment de cela, la rigueur et le sérieux manquent dès fois chez le travailleur sénégalais. Car, par exemple pour les délais de livraison que ce soit pour le menuisier, le tailleur etc., il n’y a pas de respect du timing à ce niveau. La qualité peut aussi faire défaut. Donc, c’est de là que vient notre responsabilité. Le respect de l’engagement contractuel et la ponctualité sont importantes. Par ailleurs, il y a des gens qui ne se plient pas à certains métiers dans leur pays qu’ils feraient pourtant bien en Europe. Regardez le secteur de la distribution des fruits au Sénégal, vous n’y verrez pas de sénégalais, c’est bizarre ! Seuls les étrangers s’y adonnent. C’est positif pour eux, et c’est à encourager mais la question qui se pose c’est pourquoi les sénégalais ne le font pas également.
La politique sénégalaise d’aujourd’hui connaît un grand bouleversement, voire une instabilité. Ne pensez-vous pas que c’est avant tout un problème de mentalité ?
Vous savez moi j’ai tendance à dire que, nous avons un problème sociétal très profond. On se trompe d’analyse en voulant focaliser le débat sur les politiciens. Mais c’est vrai qu’il y a parmi les politiciens (excusez-moi du terme) énormément de pourritures. La majorité ne croit absolument en rien si ce n’est à l’argent qui ne leur appartient pas pour aller acheter de l’électorat et pour vivre au-dessus de leur moyen. Mais ces politiciens là ne sont pas tombés du ciel. En réalité, ce sont des produits de la société. Ils sont nés ici, ont grandi ici et ont été éduqués ici. S’ils ont ces tares, n’est-ce pas donc la société qui a un problème. D’autre part, ces politiciens sont érigés à leur rang par le peuple lui-même. Et pourtant une bonne partie du peuple sait qu’au moment où il met son bulletin pour un candidat, sait bien que celui-ci est un voleur et un menteur (excusez-moi du terme).
Le peuple sait que l’argent qui leur est distribué provient des caisses de l’Etat. Si ce même peuple continue à faire ces choix là, il faut reconnaître que le problème ce ne sont pas les politiciens dans la mesure où ils sont qu’une petite minorité sur 14 millions de sénégalais. C’est le peuple qui doit se remettre en question. Quand un peuple a un outil aussi fort que la possibilité de choisir, il doit faire un bon choix. Regardez le résultat des législatives ! Malgré tout ce que Macky Sall et son régime ont fait ces 5 dernières années : bradages de nos ressources naturelles, violation des droits et des libertés des gens, attaques ciblées contre des opposants, radiation, limogeage, emprisonnement, gestion clanique et familiale du pouvoir etc., on n’aurait jamais pensé que Macky Sall pourrait avoir 49% des suffrages. Ces 49% sont positifs car en soi c’est bien. Mais ce pourcentage cache une autre réalité. Parce qu’il y a eu corruption des électeurs, achats de conscience, rétentions des cartes d’identité, radiation des gens sur des listes, bref tout un tas de choses. Théoriquement oui, mais moi je pense que pratiquement Macky Sall n’a même pas 30%. Mais je demande sur quelle base se sont reposés ceux qui ont votés pour lui. Pour dire que nous faisons fausse route si nous limitons l’analyse aux politiciens. Le mal sénégalais, il est partout et très profond. Il se trouve dans la fonction publique, dans la technocratie, dans la classe politique, dans notre jeunesse et même dans la sphère religieuse. Car, vous avez entendu des imams s’en prendre ouvertement à des gens comme moi en m’accusant d’avoir vilipendé et trahi des secrets professionnels. Ce qui n’a jamais été le cas. Alors que je n’ai fait que dire aux sénégalais voilà ce qui est en train de se passer et qui n’est pas bon pour notre pays. Un homme religieux devrait applaudir ! Mais c’est parce qu’il reçoit ses pécules : il est logé, il a un salaire plus une limousine. En un mot, le mal est global. Mais le système n’est pas seulement constitué d’hommes politiques.
En effet, il y a aussi des hommes de média et vous les connaissez mieux que moi. Heureusement que vous, vous n’en faites pas partie ! Ils sont nombreux : des hauts fonctionnaires, des démocrates, des hommes d’affaire etc., que vous connaissez tous, qui se déplacent de régime en régime. Ils détournent de l’argent et sont milliardaires. Tout ce système est pernicieux et il est à combattre. Il faudrait construire un système en phase avec les gens de vertu dans tous ces segments cités. Il faudrait dans ce cas que l’ensemble de ces acteurs se réunissent autour d’une vision patriotique de ce qu’on doit faire de ce pays pour faire face à ce système mafieux. Souvent je dis, entre le politicien qui pille les caisses de l’Etat pour les distribuer et le citoyen qui accepte de prendre ou qui exige même qu’on lui donne, je dirai que le pire des deux c’est le citoyen. Parce qu’il accepte qu’on lui ment et après il va continuer à vivre son calvaire pour 5 années encore voire 7. Donc, il faut un travail de sensibilisation du peuple quant au choix porté sur le candidat, qui devrait être basé sur le programme et le profil des hommes politiques et non sur des raisons ignobles d’intérêts personnels. C’est ainsi qu’on ira vers un changement qualitatif.
Selon vous, le PSE ne présente pas un programme efficace pour l’émergence de notre pays. Pour quelles raisons ?
Vous savez, eux-mêmes savent qu’ils ne peuvent pas faire émerger le pays. D’abord, il faut qu’on fasse un petit point sur la notion d’émergence. Il n’y a pas encore un consensus dans la théorie économique sur ce qu’est l’émergence. On connaissait les notions de pauvreté, de développement, depuis quelques années, on parle un peu d’émergence. Il y a une théorie qui commence à se faire autour de cette notion. Et de manière simple, on considère que l’émergence est une étape intermédiaire entre le sous-développement ou la voie de développement, ce qu’on appelle les pays en voie de développement et les pays développés. Par contre, il y a les pays sous sous-développés comme le Sénégal en terme de stratification. Ces derniers sont classés parmi les pays les plus pauvres du monde, dans les 25. Il y a les pays sous sous-développés, les pays sous-développés, ensuite les pays en voie de développement, il y a les pays émergents et les pays développés. Alors comment pouvez-vous sauter de pays sous sous-développés à pays émergents en sautant l’étape de pays sous-développés et de pays en voie de développement ? Prenez les pays comme l’Afrique du Sud, la Chine, le Brésil, ils sont encore classés parmi les pays en voie de développement. Comparez ces pays là avec le Sénégal, et vous verrez le chemin qui nous reste à faire. Je dirai simplement que c’est une supercherie de la part du gouvernement de Macky Sall. Maintenant, le sous-développement c’est quoi ? Le PSE c’est quoi ? Ce plan prétend qu’il faut, qu’on soit au même niveau d’ici l’horizon 2034, que le Brésil aujourd’hui ou l’Afrique du Sud ainsi de suite. Pour cela, trois axes sont identifiés. Mais le développement, l’émergence passe par l’industrialisation. Si vous fouettez tout le PSE, vous ne verrez pas de programme industriel. C’est le premier paradoxe. Si vous regardez le schéma qui a conduit au développement de l’Europe avec la révolution industrielle, de l’Amérique, de la Corée du Sud plus récemment, cela passe fondamentalement par l’industrialisation. Or, on ne trouve ici que le parc industriel de Diamniadio. Un parc fait pour accueillir des délocalisations et non pas pour aller vers l’industrialisation du Sénégal. Si on fait le diagnostic du PSE, on dit qu’il est bien posé que 63% de l’économie du Sénégal est tiré par le secteur tertiaire. Ce qui n’est pas bon car ça c’est la configuration des économies postindustrielles mais paradoxalement encore 64% des financements du PSE, du PAP doivent être orientés vers ce même secteur tertiaire et non pas vers l’industrie ou l’agriculture. Donc, le financement du PSE c’est l’endettement chronique. Nous, nous tirons sur la sonnette d’alarme depuis trois ans, on dit attention à l’endettement du Sénégal. Mais ici, il faut que le FMI ou la Banque Mondiale parlent pour que les gens commencent à prendre en compte l’endettement. C’est grave ! Aujourd’hui on est à plus de 60% d’endettement alors qu’il était à 32 ou 34% à son arrivée (Macky Sall, Ndlr) au pouvoir. Ce qui fait qu’on laisse une charge très lourde aux générations futures qu’il faudra payer avec les intérêts. Et un endettement pour faire quoi ? Pour construire des immeubles à Diamniadio (avec ironie et indignation) non pas pour construire l’économie ; pour construire un train qui n’a aucune justification et ils ont menti d’ailleurs au peuple sénégalais, en donnant un montant de 500 et quelques millions pour le TER alors qu’il fait plus de 1000 milliards. Voilà la situation exacte ! Dans l’exécution, 80% des marchés du PSE sont donnés à des étrangers. Ils rapatrient tous les gains, ils vont nous laisser les infrastructures qui ne serviront pas à grand-chose. Ils prennent nos milliards et il ne nous reste plus que la dette à payer. Comment voulez-vous que ce programme fasse émerger le Sénégal ? Attendez est-ce que vous avez fait le tour du Sénégal, vous avez vu certaines contrées de Kédougou, de Bakel et autres pour voir le niveau de pauvreté où les gens ont des problèmes d’accès à l’eau potable. Allez à Koumpentoum, les gens peuvent rester deux (2) jours sans avoir l’eau potable. On n’a plus d’écoles publiques. On a encore plus de 6000 abris provisoires dans ce pays et on vous parle d’émergence. A la limite, c’est de la mégalomanie de la part de Macky Sall. Ceux qui vous parlent d’émergence vous trompent.
Quelle alternative crédible proposez-vous pour conduire notre pays sur la voie de l’émergence ?
C’est pourquoi, notre recours au patriotisme est très important. Un pays doit compter sur lui-même d’abord. Nous devons capter et capitaliser toutes nos ressources et Dieu sait qu’on en a. Nos ressources halieutiques, nos ressources minières, nos ressources pétrolières et gazières, nos terres qu’ils sont en train de brader, le cas des 10.000 hectares du Fouta, qu’on peut brader à des marocains dans des conditions que personne ne connaît. Quand on n’aura pas remis nos mains sur toutes nos capacités en mettant les sénégalais au travail et en protégeant d’abord notre économie nationale, on s’en sortira. Macky Sall est allé signer les accords de partenariat économique mais c’est une catastrophe. Le jour où ces accords seront ratifiés au sein de la zone CEDEAO, on aura plus d’agriculture, plus d’industrie, plus rien. On sera une succursale de l’Union Européenne. Les gens vont encore produire chez eux et ensuite venir nous vendre. C’est un phénomène qui a déjà commencé c’est pourquoi vous voyez les grands magasins européens venir (Citydia, Auchan). Ils sont en train de se positionner par rapport à cette perspective. Notre océan a été vendu. On ne mange plus du «Thiof». Il faut une tarification douanière très forte pour que ceux qui produisent localement puissent vendre, s’accroître et avoir la possibilité de se développer et entrer en compétitivité au niveau international. Il faut remettre en cause aussi le FCFA qui est une monnaie qui nous tue. Avec lui, on ne se développera pas, car il n’est pas calqué sur notre réalité économique, qui ne nous rend pas compétitif à l’exportation et qui vous confine à être un pays importateur simplement. Nous privilégions l’entreprenariat national sur la commande publique et surtout nous travaillons à développer un secteur industriel mais avec un socle agricole très fort avec des réformes institutionnelles fortes. Refusez qu’il y ait trop de pouvoir entre les mains d’un homme ! C’est tout ce que vous ne trouverez pas dans le PSE. C’est la solution ! C’est le sentiment du patriote. Dans tous les pays forts, c’est sur cette base qu’ils se sont développés que ce soit aux Etats-Unis, en France. La société doit participer et adhérer à cette vision. Ainsi, on pourra relever le défi du développement en un temps très court car nos ressources nous le permettent. Le pire, c’est le régime de Macky Sall.
Aujourd’hui, la transhumance est au cœur de la politique au Sénégal. Quel est votre à ce sujet ?
Je n’ai même pas de mot pour qualifier cela parce que c’est ridicule. Moi personnellement, je ne peux avoir aucun respect, ni d’estime pour ces gens qui transhument. Souvent, je préfère même ne pas les connaître. Je ne veux pas de manière générale avoir une accointance avec une certaine classe politique.
Quelle analyse faites-vous de la situation actuelle des jeunes universitaires sénégalais ?
Mais on n’a plus d’université ! Et ce n’est que la répercussion de ce qui se passe à l’école élémentaire. C’est tout le système éducatif qui est saboté, désagrégé.
Alors que les enfants de ces responsables ne sont pas là. Même à l’étranger, des gendarmes sont affectés pour leur sécurité et avec l’argent du contribuable. C’est la même chose pour la santé. Ils n’en ont rien à faire que le peuple meurt dans les structures de santé. Permettez-moi de dire au passage, qu’on nous a encore menti. Combien de délais ils ont donné pour la radiothérapie au Sénégal ? Et c’est la même chose pour l’enseignement. C’est un faux débat de jeter l’opprobre sur les enseignants car quand vous créez un système d’injustice au niveau de la rémunération comme un enseignement de la hiérarchie A, payé 2 ou 4 moins, dix fois moins qu’un autre haut fonctionnaire de la même hiérarchie. Vous croyez que c’est normal. Alors que ceux-ci forment les produits de demain (futurs médecins, journalistes etc.). On signe des accords avec les enseignants qu’on ne respecte pas et après on les met en mal avec le peuple. C’est l’Etat du Sénégal qui se trompe de priorité en prenant beaucoup sur nos milliards pour faire des dépenses inutiles. Dans certaines localités, les enfants apprennent sous des arbres, d’ailleurs dans les réseaux sociaux comme facebook, les gens publient ces captures d’image. Dans ces conditions là, on ne peut pas avoir un bon système éducatif. Sans parler maintenant des problèmes de programme. On ne touche pas en profondeur les questions du programme, de même il y a peu de formation scientifique au détriment de celle littéraire. Les études ne sont pas orientées vers les besoins d’un marché. On nous apprend plus aujourd’hui la théorie et la majorité des étudiants, au sortir de l’université publique sont obligés de faire des formations techniques et professionnelles pour pouvoir être opérationnels. Mais dès fois vous voyez des étudiants qui s’expriment très mal, je vois des victimes lorsque j’anime des conférences à l’université. Il faut avoir un bon profil. Il faut réorienter l’éducation nationale.
Etes-vous de ceux qui pensent que Khalifa Sall a été écarté arbitrairement du jeu politique. Si oui, quelles sont les raisons ?
Avant tout je ne me suis jamais prononcé sur le fond de l’affaire Khalifa Sall. Je n’ai pas vu des rapports ou des éléments techniques me permettant de m’y lancer. Mais sur le plan formel, il y a un problème. Beaucoup de gens se sont fait épinglés dans leur gestion pour des faits beaucoup plus graves que ceux qu’on reproche Khalifa Sall. Là, on parle d’un milliard 700 mais ailleurs, ce sont des dizaines de milliards (voir La Poste, le Port Autonome, le COUD, les Domaines …) ; il y a énormément de rapports qui sont là et qui épinglent des classiques du pouvoir et sans parler des transhumants comme les Samuel Sarr, les Ousmane Ngom. Macky Sall a mis le coude dessus. Il a aussi le rapport de l’IGE, qui a épinglé les conditions dans lesquelles le pétrole et le gaz ont été donnés à Petro-Tim, qui implique à la fois son petit frère (Aliou Sall, Ndlr), lui-même et son ministre Aly Ngouille Ndiaye. Et vous envoyez l’IGE pour aller fouiller sur la gestion de Khalifa Sall. Et avec un empressement que rien n’explique, vous déclenchez une procédure pour prendre quelqu’un qui n’a aucun intérêt à fuir. Où pourrait aller Khalifa Sall, le maire de Dakar ? Un homme politique qui a plus de 40 ans de parcours. Après, au début de la législature, ils ont dit qu’il n’a pas droit à une immunité parlementaire. Et maintenant, le procureur écrit pour dire, levons l’immunité parlementaire. Vous voyez cette mascarade là ! C’est ce que nous dénonçons, c’est l’intimidation, l’emprisonnement. C’est pourquoi, pour moi le préalable, c’est lorsque vous savez qu’il a une immunité, vous n’avez pas le droit de l’emprisonner sans que celle-ci soit pris en compte. Ce qui est sûr c’est que cette caisse existe depuis longtemps. Si par ailleurs, Khalifa Sall y a puisé c’est que tous ses prédécesseurs en ont fait autant. C’est peut-être parce que quand on a un pouvoir qui repose sur la divination et qu’on vous a prédit que Khalifa Sall sera élu président en 2019, on se précipite pour le mettre au gnouf.
Vous semblez déranger le sommeil du régime en place. Comment vivez-vous cette bataille ?
Mais moi je suis un opposant ! Je ne m’oppose pas à la personne de Macky Sall. Je ne le connais pas et il ne m’intéresse pas. Je ne souhaiterai jamais le connaître d’ailleurs. Je ne l’ai jamais vu si ce n’est à la télé. Je crois que c’est réciproque mais je suis foncièrement opposé à cet homme dans sa manière de gouverner, et à ses méthodes. Et jusqu’à ce que Macky Sall soit destitué légalement du pouvoir, je serai toujours en face de lui comme adversaire. Je ne suis pas dans l’inimité car j’ai été éduqué autrement. Et, j’ai des valeurs auxquelles je crois. Mais, ils vont nous avoir devant eux, ils continueront à être dérangés. Nous faisons la politique autrement. Nous connaissons l’Etat. Je suis formé par et pour l’Etat. Ce sont les vrais débats qui nous intéressent. Quand la question du pétrole a été posée à l’Assemblée, mais ils sont allés jusqu’à faire des menaces. Depuis un an, nous attendons d’être notifiés de la plainte, qui n’existe même pas. J’ai situé leur responsabilité à tous, dans mon livre. J’assume tout et jusqu’à présent vous n’avez entendu de démenti officiel à ce sujet. C’est notre conception politique de s’opposer. C’est pourquoi, ils font dans la diffamation. On m’a accusé d’être membre du MFDC, Jihadiste, j’en passe. Me radier n’a pas eu l’effet recherché, freiné ma marche. C’est qu’ils ne comprennent pas notre degré de détermination.
Quelles sont vos relations avec Amadou Ba ?
On n’a aucune relation politique. On ne peut même pas en avoir. Nous n’avons pas la même conception de l’Etat. Mais, on a fréquenté la même administration. En première année d’ENA, il nous avait en comptabilité. Après ma sortie de l’ENA, trois ans plus tard on m’a affecté à son service. Je n’ai pas d’animosité à son égard.
On a appris que trois membres fondateurs de votre parti sont des collaborateurs de ce dernier. Pouvez-vous nous éclairer ?
D’abord, ce ne sont plus des membres de notre parti depuis les premiers balbutiements, où j’ai tiré sur le régime. Ils ont fait leur choix. Mais ils étaient des membres fondateurs. Je respecte leur choix.
Pensez-vous que la 13ème législature est sur une bonne lancée au détriment de la 12ème législature jugée comme un échec ?
Elle sera exactement pareille, sinon pire. J’espère qu’il n’y aura pas de coup de poing. La panique s’est installée depuis les 49% obtenus lors des élections. Ils invoquent le dialogue mais ce qui est sûr, c’est que je n’ai aucun espoir en ces législateurs vu que cette législature est sous les ordres de l’exécutif.
Croyez-vous que le Sénégal tirera profit de l’exploitation du gaz et du pétrole sachant que les partenaires sont diversifiés entre les français, les américains et autres ?
Actuellement le Sénégal est un pays complètement vendu aux intérêts étrangers. Et cela n’a jamais été aussi grave que sous le régime de Macky Sall. En attestent ce qui passe avec notre pétrole, notre gaz, les marchés publics. Quand un pays est détenu à 80% par des mains étrangères, ce pays-là ne s’appartient plus. Même si on réalise 50% de taux de croissance, sachez que les 49% sortent du pays. C’est pourquoi, cela ne réduit pas la pauvreté, ne crée pas d’emplois. Et c’est ça le problème. Dans une vision économique, un pays ne peut pas se développer sans créer une bourgeoisie industrielle forte. Au lieu d’enrichir les Marocains, les Français, les Turcs, il faut appuyer des entrepreneurs sénégalais mais qui soient à leur tour des patriotes. Des gens qui investissent au Sénégal, qui recrutent au pays et qui vont à l’assaut de la sous-région et du monde plus tard. C’est comme ça qu’un pays se construit. On n’en tirera aucun profit. Il faut réformer alors le code pétrolier.
Qu’en est-il du Zircon en Casamance ?
Cette exploitation ne se fera pas, les populations ne l’accepteront pas. Car, ils n’en voient pas les gains. D’abord, il y a les questions environnementales, une dune de sable qui constitue là-bas un verrou extrêmement important contre l’avancée des eaux salines. Et ensuite, il y a un écosystème où il y a une reproduction de toutes les espèces marines.
Quel est votre plat préféré ?
J’aime tous ce qui se mange. A part ce qui est interdit, je n’ai pas de refus, l’essentiel c’est que ça soit bien préparé. Maintenant, j’ai un petit faible des plats de chez moi (la Casamance). C’est pourquoi j’aimerai bien que les sénégalais les découvrent, ce sont des plats sains où il n’y a pas beaucoup d’huiles, ni de substances qui nous rendent malades. Mais aussi j’aime bien le «deukhine saloum» surtout la nuit (éclats de rires).
Que pensez-vous de la polygamie ?
(Rires). C’est une excellente chose .Tous les hommes sérieux et capables de prendre plusieurs épouses, qu’ils en prennent pour réduire le chômage matrimonial dans ce pays. Personnellement, c’est ma conviction. On n’est pas des occidentaux. Dès lors un homme est libre de faire son choix, il peut être soit monogame, soit polygame. Pour ma part, la polygamie est une bonne chose pour surtout équilibrer notre société.
D’aucuns pensent que vous êtes un farouche opposant qui a du mal à suivre les règles. D’ailleurs, ce qui a abouti à votre radiation de la fonction publique pour manquements à la rectitude déontologique. Qu’en est-il réellement ?
Mais très simplement et avec beaucoup de philosophie. De toute façon, j’avais l’ambition de quitter l’administration dans une période qui n’était pas très éloignée de celle-là. J’avais même commencé des démarches, pour prendre un détachement, ils me l’ont refusé. De là, je me suis dit que si je terminais à mettre en place mon petit système, je quitterais. Donc pour moi, la fonction publique n’a jamais été une qualification en soi. J’y ai passé de beaux moments et j’ai beaucoup appris mais je crois après autant d’années dans cette structure et surtout quand on a l’engagement que j’ai ma place n’était plus dans celle-ci. D’ailleurs, aujourd’hui je me sens libre, car vous savez que dans la fonction publique y’a tellement de contraintes et de suggestions. Par exemple : vous ne pouvez pas publier un livre ou voyager sans autorisation, Par contre aujourd’hui je publie tous ce que je veux, et je voyage quand je veux ainsi de suite….
Je n’ai jamais eu aucun problème de survie quand j’étais dans l’administration. Je rends grâce à Dieu. J’ai mis en place mon cabinet mais aussi j’ai eu le soutien de beaucoup de sénégalais, de la diaspora surtout que je remercie d’ailleurs. Le temps de mettre en place mon système, mon cabinet, mes activités personnelles etc. Aujourd’hui je suis un parlementaire, je n’ai aucun problème. Je peux que rendre grâce à Dieu. Au contraire, je vis même beaucoup mieux. Sur ce, je crois que Macky Sall m’a rendu un grand service : celui de nous avoir mieux révéler aux sénégalais car ç’a été un tournant plus ou moins dans la carrière politique.
Vous aviez accusé l’Assemblée nationale de fraude fiscale. Pourtant les députés paient les impôts. Quel était le but recherché ?
Bien sûr qu’au niveau de l’administration, il y a une fraude fiscale. L’assemblée nationale a été redressée pour plus de 4 milliards pour des impôts et taxes. Vous imaginez ? Non pas parce que les députés n’ont pas payé leurs impôts mais parce qu’il y a une routine à la chose, c’est plutôt que l’administration de l’Assemblée Nationale ne l’a pas reversé. C’est grave ! Dans ce sens, c’est facile de faire recourir à une poursuite pénale. D’ailleurs, récemment en tant que député, j’ai écrit à Moustapha Niasse, pour lui dire de nous faire la lumière à ce sujet : Où est-ce qu’ils en sont ? Est-ce qu’ils ont payé ? Est-ce qu’ils ont situé les responsabilités ? Est-ce qu’ils ont pris les sanctions qu’ils faillaient prendre ? En ce sens, je n’ai pas encore eu de réponses à ce propos. Sur ce, à chaque fois que je le rencontrerai, je lui rappellerai car il ne faut pas que cela se reproduise avec notre législature. De là, je tiens à préciser que ce n’est pas le seul problème à l’assemblée nationale, il y en a beaucoup. C’est pourquoi, on est en train de travailler sur des dossiers et surement dans les jours à venir vous serez informés. Tout ce que je peux dire c’est la gravité des problèmes au sein de cette assemblée. Il y’a de nombreux choses qu’il faut indexer voire dénoncer. Ils se disent honorables ! Ce terme que je déteste d’ailleurs. Aucun texte n’a jamais mentionné cela. On les a honoré pour les élire alors, il faut qu’ils soient exemplaires de par leurs comportements. L’assemblée nationale ne doit pas tomber dans les affaires de fraude fiscale etc. Je trouve cela inadmissible. Et cela nous allons l’indexer, rassurez-vous! Espérons, que je ne sois pas radié de là également (éclats de rires).
Lors des législatives du 30 juillet, le mouvement Pastef-Les Patriotes n’a obtenu qu’un seul député. Etes vous déçu de ce score ?
Non ! On est très satisfait de nos résultats. Vous savez après 2 ans d’existence, sans moyens financiers, avoir 40 mille sénégalais qui vous accordent toutes leurs confiances, je crois qu’il y a de quoi rendre grâce à Dieu. Sur 47 listes partantes, on est sorti 6ème après seulement 2 ans d’actions politiques alors que nous faisions face à des gens qui ont un appareil politique, une machine électorale, et beaucoup de milliards volés dans les caisses de l’Etat. Par contre, nous, nous sommes allés par nos propres moyens. Toute notre campagne s’est effectuée avec les contributions des uns des autres et cela nous a couté 27 millions. En ce sens, ce n’est même pas une journée de campagne de Mahammed Boun Abdallah Dionne. Je ne sais pas si vous aviez vu sa caravane. C’est pourquoi, nous n’avions même pas pu faire d’affichage car nous n’avions pas eu des moyens, nous n’avions pas été présents dans tous les bureaux de vote parce ce que nous manquions de liquidité. Les gens demandaient entre 2500 à 3000F pour siéger dans les bureaux de votes. En ce sens, si vous effectuerez le bilan, cela nous couterait 40 millions. Ce qui représente une somme au-dessus de nos moyens. Malgré le fait de ne pas être présent dans les bureaux, de nous avoir volé en inversant nos bulletins, on sort 6ème, de plus avec un député. Tout ce que je peux dire, c’est rendre grâce à Dieu. Je dirai qu’on est loin de l’échec pour un parti avec seulement 2 ans d’existence et sans beaucoup de moyens. Nous avions juste fait avec ce que nous avions. Pour ma part, c’est un excellent début, qui nous motive à aller de l’avant, à continuer à travailler.
Quelles réflexions faites-vous du nouveau gouvernement formé après ces élections ?
Simplement, c’est un gouvernement de politiciens pour préparer 2019 avec une mascarade assise sur un prétendu dialogue politique. De là, nous, on ne peut pas dialoguer avec Aly Ngouille Ndiaye. Celui-là, avec tout ce qu’il a fait au département des mines et de l’énergie. Je ne pourrai jamais avoir confiance sur cet homme. C’est juste une perte de temps, c’est tout ce que je peux dire.
Sur ce, prévoyez-vous de forger des alliances avec les autres partis ?
Déjà on était allé en coalition, contrairement à ce que les gens pensent. Par contre, nous ne pouvons aller qu’avec des gens avec lesquels nous partageons de fortes convictions même si c’est de petits partis, de petits mouvements. A ce niveau, il y a des discussions qui ont démarré au sein de l’opposition pour préparer 2019 et on verra avec qui on pourra avoir suffisamment d’affinités. Pour le moment, je m’en limiterai à cela. Mais, dans tous les cas, si nous réunissons toutes les conditions nous irons seuls aux élections. Si ce n’est pas également le cas et que nous discutions avec des acteurs crédibles, sérieux qui nous permettront d’avoir une alliance sans ternir notre image car nous avons que notre image en politique. Dans ce cas, nous examinerons l’idée de faire une alliance pour l’intérêt du peuple sénégalais.
PORTRAIT
A 43 ans le chef du parti Pastef-Les Patriotes n’en est pas moins vigoureux. En effet, toute son énergie apparaît dans les mouvements de son corps rythmés par le son et le timbre de sa voix pour dénoncer la mauvaise gestion de la politique. Avec un verbe tranchant, une barbe de sagesse qui n’a d’égale que le point noir sur le devant de sa chevelure (signe de piété), un visage suscitant la confiance et la sincérité, des mots qui suggèrent une foi en son combat, des doigts pointant et cherchant un coupable, montrent qu’il est de la trempe des leaders politiques amoureux de l’éthique, respectueux des valeurs, conscient d’un pays souffrant de maux, dont il se considère le remède. C’est bien le type qu’un citoyen lambda donnerait sa voix lors d’un scrutin. A côté, Ousmane Sonko est un homme ouvert et très attaché aux valeurs sociales. Mais ce qui fait la fierté citoyenne de cet homme, ce n’est ni d’être un tricheur, encore moins un vendeur d’illusions, mais celui qui s’est donné pour mission de défendre les intérêts du peuple sénégalais. Seule la vérité compte ! Au restaurant dakarois «Presse Café» où s’est déroulé notre entretien, il inspire le respect et la modestie par son allure et son calme. Vêtu d’un ensemble, veste et pantalon noir débouchant sur une chemise clair, et d’une cravate noire, il reflète le tempérament d’un révolté. Mais avant tout, c’est un député arrivé à la bonne heure de la politique. Sur ce, la détente de Sonko est assez stressante, on dirait la représentation d’Orphée à l’opéra : dans votre loge, expiez votre passion, chers lecteurs, dans cette détente émouvante d’une fin de semaine. Bon Magal !!!
CONSEILS DE L’INVITE A qui : Au peuple sénégalais.
Sur Quoi : le peuple doit arrêter de se réfugier derrière son tiroir en essayant de trouver des responsables parce que la souveraineté nationale et la force appartiennent au peuple. Il doit arrêter de faire un mauvais choix politique.
Ousmane Sonko |
SUD QUOTIDIEN SAM-DIM 4-5 NOV 2017
Par AMINATA SARR ET FATIMA FALL
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